J'ai noté avec intérêt le concert des réprobations qui a suivi la distribution des portefeuilles ministériels dans les premiers 100 jours de Sarkozy. Je me souviens encore du cri du coeur poussé par Devedjian découvrant que son fidéle ami et néanmoins président avait accordé la place qu'il revendiquait au sein du gouvernement à un autre : Je suis pour un gouvernement d'ouverture, y compris aux sarkozistes!
Franz de Waal , le célèbre primatologue, apporte un éclairage qui peut nous aider à décrypter ce qui s'est passé, dans son livre "le bon singe".
Il aborde en effet dans son ouvrage, notamment la question de la justice sociale chez les primates non humains.
En fait il nous rappelle qu'il existe une règle ancestrale chez les primates les plus évolués (chimpanzés) dans le domaine de la justice sociale qui consiste à arbitrer souvent pour les subordonnées au détriment des membres les plus puissants du groupe voire de la parentèle (famille) et des amis les plus proches.
C'est à dire qu'en cas de conflit, le chef primate va donner raison aux subordonnés de moyenne classe plutôt qu'à ses "potes".
Pourquoi ? il semblerait que ce soit un moyen de réunir le maximum de voix, puisque l'exercice de conquête et de maintien au pouvoir suppose d'être soutenu par le maximum de membres de la tribu.
Les voix de ses "amis", parents" étant à priori acquises, le chef a tout intérêt à élargir son réseau d'influence et à s'attirer les bonnes grâces des subordonnées de la middle class.
Une autre raison expliquerait cette attitude du chef dans la justice sociale. En arbitrant en faveur des classes moyennes du groupe, le chef réduirait l'écart entre les subordonnés dominants du groupe et les subordonnés moyens. Ce faisant il réduirait le pouvoir d'influence des subordonnées dominants et contribuerait ainsi à sécuriser son poste. Car chez les primates humains comme non humains, c'est bien connu la menace vient de "ses alliés", c'est en général l'ex numéro 2 du groupe, ou en tout cas l'un des subordonnés dominants du groupe qui peut renverser le chef ou lui succéder.
Mieux vaut prévenir que guérir, le chef va donc chercher à étendre sa sphère d'influence, à fragiliser ses alliés dominants actuels, on n'est pas loin de la stratégie "du diviser pour régner".
En fait ce qu'on pourrait qualifier chez un chef, de comportement parfaitement altruiste (à savoir aider les plus faibles...) relèverait plutôt d'un comportement politique.
Les proches des hommes de pouvoir, s'ils veulent s'éviter de douloureuses déceptions, feraient bien d'avoir en tête qu' ils ne seront pas nécessairement toujours soutenus, loin s'en faut, par leur chef, en tout cas si celui ci se plie aux ancestrales règles primates pour gouverner.
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